#Breuvages

Le caviste / Carnets de voyage – Rhône Nord, partie 2

Notre première visite de l’année est consacrée comme souvent à la vallée du Rhône Septentrionale, terre d’élection de la Syrah, du Viognier, de la Roussanne et de la Marsanne. Nous sommes impatients de goûter ce millésime 2016 dont on parle tant dans la région, et qui suit le très médiatisé 2015 que nous avons dégusté plusieurs fois déjà. Nous sommes heureux parce que notre région de prédilection affiche à son compteur une série impressionnante de millésimes très, très réussis… Huit millésimes à la file, je n’ai jamais connu cela en 30 ans de carrière…

Au programme de l’après-midi, quelque chose d’un peu spécial pour moi…c’est en effet en quelque sorte un anniversaire qui, pour être anecdotique, n’en revêt pas moins un caractère presque sentimental… En 1986, je rencontrais Bernard Faurie pour la première fois grâce à Jean-Louis Grippat. C’était le deuxième jour de mon premier voyage en France, et j’étais à des années lumière de m’imaginer en dégustant et achetant son millésime 1984 que trente années plus tard le millésime 2014 serait à la vente au Moulin…

 

Rhône

 

Domaine Bernard Faurie

Ce vigneron débutant et inconnu allait sur cette même période devenir une référence de l’appellation pour tous ses pairs et les connaisseurs du monde entier. Vous dire que j’ai un souvenir précis de ces trente millésimes serait quelque peu travestir la vérité mais je peux vous assurer que 1985, 1989, 1990, 1991, 1997, 1999, 2001, 2010 et 2012 sont des vins qui transcendent à la fois l’appellation et la façon de travailler de ce vigneron euh…atypique ( le roi de la pipette pour ceux qui le connaissent ) mais tellement attachant… Soit dit en passant, l’autre vigneron « rescapé » de ce premier voyage ne vous est pas inconnu non plus puisque j’achetais plus tard en cette même année mon premier millésime de Trévallon, le 1984 également…

Bernard Faurie a toujours vendangé en fonction de la maturité de ses parcelles et n’a jamais assemblé le tout pour faire un seul Hermitage… c’est ainsi que sur un même millésime peuvent cohabiter des bouteilles de Greffieux, de Méal, de Bessards, de Greffieux-Méal, de Greffieux-Bessards, de Bessards-Méal et de Greffieux-Bessards-Méal… Capito ?

A quoi on les reconnait ? Bon sang mais c’est bien sûr… Au numéro de lot gravé sur la bouteille; mais attention, vous pouvez aussi avoir deux lots différents d’un même assemblage selon les dates de vendanges. Et comment vous faites pour savoir à quoi correspond le n° de lot ? En demandant au propriétaire (s’il ne l’a pas paumé quelque part) ou à votre importateur préféré qui va tous les ans (et plutôt deux fois qu’une…) goûter et regoûter afin de choisir et parfois de recomposer un assemblage.

En un mot comme en cent, bienvenue au Moulin à Vins !

Et donc cette année 2015, qu’y aura-t-il de chez Bernard ? Trois cuvées sont prévues pour vous : Bessards-Meal, Greffieux-Bessards et Bessards pur. Le millésime et la part importante de Bessards va nous donner des vins plus structurés que les années précédentes et une moins grande accessibilité. L’ossature granitique de ce terroir des Bessards, bien présente, va par contre tenir les vins d’une façon un peu plus sévère.

D’une belle tenue donc, et si vos enfants nés en 2015 aiment déjà le vin, faites leur plaisir, gardez les ! Les 2016 étaient dans une phase un peu compliquée le jour ou nous les avons dégustés et nous vous en donnerons plus de nouvelles en septembre, mais comme le millésime est grand, pas de raison de s’en faire.

 

Rhône

 

Domaine Vallet

Et pour la qualité conjointe des deux millésimes, rouges aussi bien que blancs, la palme d’or est attribuée  cette année au… Roulements de tambour… domaine Vallet !, La modestie naturelle d’Anthony va en prendre un coup, mais c’est plus qu’amplement mérité. Bien sûr la nature a été clémente, bien sûr le père Louis a bien travaillé dans les vignes, mais le résultat est là.

En 2015 comme en 2016 et sur quasi toutes les parcelles, la qualité est époustouflante. Des blancs frais, tendus, précis, des rouges pleins, soyeux, juteux, toute la cave est un régal… Les 2016 vont nous permettre de nous en donner à cœur joie autant pour les « Quintessences de Rouasses » que pour les éventuelles « Cimes des Côtes » mais je voudrais surtout souligner le magnifique travail d’assemblage de mon vieux complice (je ne sais plus si cela s’écrit en un ou en deux mots) Iraclis pour le Quintessence de Rouasses 2015. Avec Anthony ils ont réussi ce que je pense être le meilleur Quintessence depuis le premier (1999) et malgré les très beaux 2009 et 2010. Du grand art, chapeau ! Vous allez vous régaler.

Cette année de nombreuses parcelles nous ont impressionnées, confirmant sans aucun doute que le domaine est sur le chemin du podium de l’appellation. Plus les années passent et plus les caractéristiques et les subtilités de chaque pouce de terrain sont examinées en détail et étudiées de façon à en tirer la plus belle expression possible.

Vous connaissiez « Rouasses » ? Bientôt « Marquian » ou « Joubert » n’auront plus de secret pour vous. Deux millésimes à ne rater sous aucun prétexte. A bon entendeur…

Rhône

 

Domaine Jamet

Nous terminons cette semaine en beauté puisque nous voilà au domaine Jamet avec  Florent Viale, Anthony Vallet, Guillaume Gilles et Johann Michel qui ont pris un peu de temps pour nous accompagner. C’est parti pour un grand moment de convivialité… Quel plaisir de se retrouver ensemble et de comparer nos commentaires de dégustation avec ces professionnels heureux comme des gamins dans une cour d’école !

On commence par faire le tour des deux derniers millésimes sur les vins de pays, Côtes-du-Rhône, Condrieu et Côte-Rôtie. Par parcelle, par assemblages de parcelles selon les dates de vendanges, par manière de vinification ou d’élevage, Jean-Paul explique en détail le travail minutieux qu’il a mis en place depuis des années pour amener le domaine là où il est aujourd’hui. La dégustation des bouteilles, à l’aveugle, est un prolongement de la pensée de Jean-Paul, une partie d’aboutissement peut-être… il a tout conservé de ses expériences !

Et c’est là que l’on commence à comprendre… Nous n’épuiserons jamais le stock de surprises puisque sa curiosité est sans limites. C’est ainsi qu’au cours des ans nous avons goûté du viognier de côte-rôtie vinifié séparément afin d’essayer de voir ce que cela pouvait apporter en assemblage avec la syrah, des essais de cuvées égrappées et non égrappées de millésimes différents, dégustés d’abord seuls puis assemblés de diverses manières, par style ou par millésimes, des Côte-Rôtie en vendanges tardives, des élevages courts, des moyens, des longs, essais réalisés sur plusieurs parcelles et années… des verticales sur un même travail dans des millésimes différents, ou sur une même parcelle vinifiée de façon différente sur des millésimes similaires….

Bref, et comme vous pouvez le constater, les expériences sont illimitées et nous nous baladons à travers le temps et les diverses cuvées pendant plus de six heures sans voir le temps passer, et souvent, il faut arrêter Jean-Paul qui a plus de vins dans sa cave qu’un magicien n’a de lapins dans son chapeau… Du travail, de la patience, de la curiosité, de la précision, l’arrivée au sommet de la hiérarchie de la Côte-Rôtie n’est pas un hasard… CQFD…..

Merci à tous ces vignerons qui chaque année lèvent un peu plus le voile pour nous et nous aident à appréhender le vin d’une façon différente. On ne finit jamais d’apprendre en cette matière.

Pour les prochaines pérégrinations dans le vignoble, je vous emmène dans un voyage « à travers tout » : de la Loire au pays Basque, des Alpilles au Beaujolais…  et ensuite un spécial Stéphane Vedeau, l’homme aux multiples terroirs et facettes. Les deux paraîtront sans doute en juillet…

Vous aimerez également

Pas de commentaires

Poster un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.