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Vins: L’incroyable histoire de la grande vidure

Lorsqu’au XIXe l’aristocrate chilien Silvestre Ochagavia emporte avec lui des plans de grande vidure lors à son retour vers le nouveau monde, il est loin de s’imaginer que, tel Noé, il emporte avec lui les derniers espoirs de ce cépage, voué à une fin tragique sur le vieux continent. Victimes chez nous du phylloxéra, les précieux plans de vigne sont pour un temps rayé de la carte, avant d’aujourd’hui refleurir les rayons de nos supermarchés. Retour sur cette saga vinicole hors du commun.

Un cépage ancestral

Originellement, ce sont les pèlerins de Compostelle qui importent du pays basque les premiers plans de grande vidure à Bordeaux. Issu de la famille des carmenets (cabernet sauvignon, cabernet franc, merlot ou sauvignon), ce cépage rond et épicé est alors rapidement cultivé en abondance dans le bordelais du XVIIe, qui jouit d’une réputation mondiale pour ses vins d’excellence.

La phylloxéra, la maladie de la vigne

Dès la seconde moitié du XIXe, rien ne va plus les vignobles français. Soucieux de se prémunir contre l’Oïdium, un champignon qui attaque les vignes européennes, plusieurs vignerons français importent des plans américains. Ils sont hélas loin de s’imaginer que ceux-ci transportent un funeste passager clandestin : le phylloxéra. Un puceron inoffensif pour les pieds de vigne américains, mais ravageur pour les pieds de vigne européens. En à peine deux décennies, c’est l’hécatombe. Plus de la moitié du vignoble français est ravagée. En Europe, le puceron marque sonne le glas de la grande vidure, remplacée dans le bordelais par le cabernet sauvignon.

Une découverte hors du commun

Sans le savoir, c’est l’aristocrate chilien Silvestre Ochagavia qui, a son insu, sauve le cépage, lorsque quelques années avant l’épidémie, il emporte avec lui quelques spécimens du plan dans le nouveau monde. La grande vidure résiste, mais elle tombe dans l’anonymat tandis qu’elle est cultivée pendant plus d’un siècle comme un merlot, aux yeux et à la barbe des viticulteurs chiliens.

Ce n’est qu’avec le renouveau des vins chiliens en Europe que l’attention de Claude Volat, œnologue de l’Université de Montpellier en vient à se porter sur ce raisin si particulier, aux gros grains caractéristiques et aux feuilles atypiques pour du merlot. Après près de trois années d’analyses ADN, il finit par en conclure qu’il s’agit bien de la grande vidure. Le cépage oublié que l’on croyait décimé est ressuscité.

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Depuis lors, beaucoup de vin a coulé dans les chais et le fameux cépage a fait son retour dans nos verres, bien qu’il reste encore très majoritairement cultivé en Amérique, et au Chili en particulier. Dans la région, même les plus célèbres maisons cultivent la grande vidure, désormais appelée carménère en hommage à la couleur rouge carmin du cépage. Agréable en bouche, il se déguste avec la joie du miraculé, qui après avoir évité le pire, savoure chaque goulée de sa nouvelle vie.

 

 

 

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