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Le beaujolais nouveau : entre réjouissance et effet d’annonce

Ca y est, il est arrivé. Chaque année, c’est pareil. Le 3e jeudi de novembre, on débouche le beaujolais nouveau, dans un esprit de fête et de convivialité, pour le plus grands plaisirs des viticulteurs de la région. Mais au-delà du côté festif, que faut-il en penser ?

Le beaujolais nouveau est un vin jeune, aussi appelé « primeur » en raison du fait qu’il est produit et consommé à partir de grappes récoltées dans l’année. Produit dans la région du nord du Rhône et de la Saône-et-Loire presque exclusivement à partir de Gamay noir, le Beaujolais nouveau se caractérise par une robe rouge claire, une faible teneur en alcool et des saveurs acidulées qui vont du bonbon anglais à la banane mûre.

Mais s’il est connu de tous, c’est avant tout car, n’étant que faiblement macéré (4 jours à peine), il ne se garde pas. Une particularité que les producteurs ont pu tourner à leur avantage. Véritable coup de vent dans le monde viticole, il se garde maximum six mois en cave après son arrivée sur le marché, tandis que la plupart des débits de boisson ne le proposent à la carte que durant quelques jours, voire quelques semaines pour les plus convaincus.

Un peu partout dans le monde, l’arrivée du Beaujolais nouveau est même devenu synonyme de bacchanales arrosées et de lendemains de veille douloureux. Confréries par-ci, clubs par là, chacun s’en donne à coeur joie. En Corée du Sud ou au Japon, il est même fréquent de trouver des groupes d’amateurs qui célèbrent le précieux nectar corps et âme, en allant jusqu’à s’y baigner. Au total, c’est près de 30 millions de bouteilles qui sont vendues chaque année dans plus d’une centaine de pays. Et la Belgique n’est pas en reste, avec 290 000 bouteilles écoulées en 2016.

A l’origine de ce folklore, on retrouve une habile manoeuvre légale. Le 11 mars 1951, le règlement sur la vente des vins en France évolue et interdit la commercialisation des vins d’appellation d’origine avant le 15 décembre de l’année de production. Les producteurs de Beaujolais, qui tombent sous le coup de l’interdiction en raison de leurs appellations protégées (beaujolais et beaujolais-village), s’insurgent. Mieux encore, ils obtiennent gain de cause. Exemptés, ils sont autorisés à commercialiser leur production à partir du 15 novembre, avant que la date ne soit définitivement fixée au 3e jeudi du mois.

Succès marketing, le Beaujolais nouveau est depuis lors un produit tendance, dont le recours massifs aux levures artificielles et à la chaptalisation donne chaque année des crus aux saveurs surprenantes de violette ou de banane. Parfois, cela va même un peu trop loin, comme en 2016, quand le goût prononcé de banane en a déçu plus d’un. En 2017, malgré une mauvaise récolte due à des conditions climatiques difficiles, le goût s’annonce toutefois plus agréable, avec des notes qui tendent davantage vers la cerise.

Si le « phénomène » Beaujolais nouveau est une bénédiction pour ceux qui se réjouissent des quantités écoulées, il est en revanche une malédiction pour ceux qui essaient de valoriser l’image qualitative des vins du Beaujolais, en poussant le retour à des procédés plus traditionnels. Alors, piquette ou non le Beaujolais (nouveau) ?
Le mieux reste sans doute de le goûter (tant qu’il est encore temps).

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